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Pure Baking Soda : K.Dot, Straight Outta Compton



Construire un album autour d’un concept est une entreprise risquée. C’est risquer d’être incompris, c’est risquer d’échouer à aller au bout de son concept, c’est surtout risquer de faire passer la musique au second plan.

Kendrick Lamar a voulu monter son premier album comme un film. Sur la forme, le pari est réussi grâce à un déroulement original fait de flashs back et d’interludes qui résonnent à l’intérieur même des chansons, afin de les ancrer dans le récit. Son histoire, certes captivante, n’est en réalité qu’un prétexte pour nous décrire Compton et la façon dont elle pèse sur ses habitants comme une machine infernale.

Mais un album qui raconte une histoire, aussi bien ficelée soit elle, n’est réussi que si la musique est d’avantage qu’une bande originale. Parce qu’avant tout, cela doit être de la musique. Alors si Good Kid m.A.A.d. City est un très bon album, c’est parce que par delà l’ambiance et la vie de Compton, il rend astucieusement hommage au meilleur de sa musique.

Bien qu’ils n’aient pas participé à la composition de l’album, les spectres de DJ Quik, Dr. Dre, Scott Storch et d’autres ne cessent de planer sur le disque. Il n’y a jamais de véritable singerie de leurs travaux, mais chaque titre ou presque, par des éléments subtilement disséminés, un piano, une guitare, une sirène, nous renvoie aux productions de ces légendes qui ont marqués la musique de Compton, qu'ils en soient originaires ou non. Si bien que même sans écouter un seul mot de ce que Kendrick Lamar nous raconte, on devine qu’il est un enfant de cette ville, élevé à Rythm-al-ism, Chronic, 2001, We Come Strapped ou Straight Outta Compton.

C’est bien l’histoire qui se retrouve être au service de la musique, non l’inverse, comme quand sur « Backseat Freestyle » Kendrick prétexte la prise de drogues et d’alcool pour perpétuer la tradition de l’egotrip plein d’argent et de biatch, cher à nombreux rappeurs du coin. Et quel rappeur ! Le flow de Kendrick, tout terrain, change de vitesse pour s’adapter à tous types de prod, et qu’il crie ou qu’il chantonne, il arrive à ne faire qu’un avec son instru, pour que jamais l’un ne vienne parasiter l’autre.

En somme, dans cette volonté d’incarner sa ville, good kid m.A.A.d city réussit là où Documentary, sorti lui aussi sur Aftermath, a échoué. Multiplier les références à N.W.A. n’avait pas suffi à faire de Game plus qu’une coquille un peu vide au service de ses instrus, alors que Kendrick Lamar incarne entièrement Compton, dans son rap, son storytelling et sa production.

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