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Lacrim : Lacrim: interview X Les Inrockuptibles “Il y a eu beaucoup de brouillard dans ma vie” !

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L'album "Corleone" de Lacrim est disponible depuis ce Lundi 1er Septembre ici: http://po.st/CorleoneIT !

Découvrez son interview avec Les Inrockuptibles !

“Je ne suis pas un personnage.” Cinq années de prison en bandoulière, Karim Zenoud, alias Lacrim, sort son premier album, “Corléone”, chez Def Jam. De sa voix rauque, le rappeur de 29 ans parle de ses années en prison, de la préparation de son album et de sa futur mixtape.

>> Face caméra, Lacrim raconte sa plongée carcérale

Avant même sa sortie, ton album se hissait au troisième rang des ventes digitales. Tu es surpris par ce succès ?

Lacrim - Oui, je ne m’attendais pas du tout à cela. Ma seule préoccupation était de faire un album consistant. Après, je ne suis responsable que de 50% de mon succès, c’est le public qui fait le reste.

On sent également une grosse attente médiatique…

Oui c’est vrai. Laurent Bouneau (directeur général des programmes de Skyrock – ndlr) a aimé l’album, ça me touche. J’ai réalisé quatre street-albums avant la sortie de cet album et je pense que certains sons auraient sans doute pu trouver leur place en radio mais j’étais en indé et je n’avais pas du tout la même visibilité qu’aujourd’hui en ayant signé avec Def Jam.

Parmi les raisons qui expliquent ton succès, on évoque aussi ta proximité et ton ancrage local…

J’ai fait un gros travail de proximité en amont. Les gens des quartiers sentent que je suis comme eux, que je ne surjoue pas. En 2012, j’ai fait un tour de France des quartiers. Je donnais rendez-vous aux gens grâce aux réseaux sociaux et sans aucun relais dans les médias et le public répondait toujours présent. Le bouche à oreille fonctionnait à fond. Mais je n’ai pas la prétention de devenir une star et je ne veux pas l’être. Je veux rester simple et naturel.

Sur ton titre “Pocket Coffee”, tu dis : “Des mecs comme moi dans le rap il y en a peu mais dans les cités il y en a des milliers”. Pourquoi as-tu le sentiment d’être différent ?

C’est le public qui m’estime différent. J’ai beaucoup galéré et ça doit se ressentir. Mon parcours ressemble à beaucoup de jeunes dans les cités. Des gens me disent “Des mecs comme toi qui ont galéré, il y en a pas dans le rap”, je suis d’accord. Je suis l’un des premiers ou l’un des seuls. Lacrim, c’est entièrement moi ; ce que je raconte dans ma musique, c’est ce que j’ai vécu. Le décrochage scolaire à 11 ans, les cinq peines de prison dont j’ai écopé, la tristesse que j’ai infligée à mes parents. Il y a eu beaucoup de brouillard dans ma vie.

Ce qui frappe dans ton album, c’est la qualité des prods de Kore, notamment sur les titres “La Rue”, “Oz” ou encore “Mon glock te mettra à genoux”. Ça fait longtemps que tu travailles avec lui ?

J’ai rencontré Kore avant que je travaille sur cet album. J’avais participé à la compilation R’nB fever 4 à l’époque et à un projet avec son petit frère DJ Bellek. Après cela, nos chemins s’étaient un peu séparés. Mais même à distance, il a continué à suivre mon évolution, à écouter mes textes et il a eu envie qu’on retravaille ensemble. J’ai tout de suite accroché à son univers. J’aime le fait qu’il soit fou, qu’il ne soit pas du tout français dans sa sensibilité artistique.

Quels sont tes prods préférées ?

“Oz” et “On ne fait pas ça”. J’aime bien “Corleone” aussi.

Tu avais bossé avec Therapy (producteur de Booba puis Kaaris) en 2013 ? Pourquoi ça s’est arrêté ?

Ca ne s’est pas arrêté. Simplement, j’ai rencontré Kore et j’ai obtenu tout ce qui me fallait. L’alchimie était parfaite donc je n’ai pas cherché d’autres prods ailleurs. Je te jure, quand Kore est arrivé avec sa palette de prod, j’ai tout de suite tapé mes fesses par terre.

Par rapport à tes précédents sons, on a l’impression que tu as simplifié tes lyrics et que tu recherches davantage l’émotion

Ca dépend des morceaux dans “Oz” effectivement, je cherche l’émotion. C’est vrai que j’ai sans doute simplifié mes lyrics car parfois quand on veut sortir des rimes très complexes, c’est au détriment du message. De manière générale, je cherche la rime parfaite. Pour moi, “Karim” et “gym” ça ne rime pas ensemble. Et quand tu cherches la rime parfaite sur un 2 ou 4 mesures, le message ne passe pas forcément. Vous êtes obligé de dérégler les mots pour que ça fonctionne. C’est technique. (Il fait semblant de poser une addition avec ses mains). Si je place ce mot là, il faut qu’il y ait celui là, là-bas. Le rap, c’est des maths en fait.

Tu as généralisé l’usage de l’autotune également…

Oui j’en ai beaucoup plus mis dans l’album que nulle part ailleurs. Dans mes autres EP, j’en avais mis que sur quelques morceaux. Je mets de l’autotune car je ne suis pas un chanteur. J’écoute beaucoup de sons américains et je vois que tout le monde s’y met. Il suffit de penser à Future ou French Montana.

Ton titre “Tout le monde veut des lovés” est rapidement devenu un tube sur les ondes. Tu l’avais conçu comme un morceau FM ?

Non paradoxalement, c’est le seul morceau que j’ai écrit en prison. J’ai beaucoup écrit en prison mais aucun titre ne figure sur l’album à part celui là. Comme je n’avais pas les prods, c’était plus compliqué d’écrire. Souvent, j’écoutais des prods cain-ri et j’écrivais dessus. Je me faisais la main en fait. Mais j’ai surtout fait du sport. J’ai voulu tenir un peu la musique à distance. L’erreur que j’ai faite c’est Karim Zenoud qui la paye, ce n’est pas Lacrim.

Comment s’est passée la collaboration avec Lil Durk et French Montana qu’on retrouve en featuring sur ton album ?

De la même manière sauf que French Montana a posé à Paris. Lil Durk ça s’est organisé aux Etats-unis, dans son studio mais à distance. Comme j’avais encore mon bracelet, je n’ai pas pu faire le déplacement. Je suis très satisfait de ces deux featurings.

Tu as déjà d’autres projets en préparation ?

Je travaille déjà sur ma mixtape. Je travaille avec des prods plus vastes, je suis moins sélect. Je ne peux pas encore donner de dates mais il y aura des featurings et des trucs de fous. J’avais réalisé un autre feat avec Mister You. Mais nous étions tous les deux pas hyper convaincus par le titre.

Sur les réseaux sociaux, on voit que tu as une communauté hyper jeune qui te suit (de 16 à 18 ans) alors que tes lyrics sont très sombres. Comment tu l’expliques ?

Je ne suis pas d’accord. C’est mal me connaître de dire que j’ai que des jeunes derrière moi. Les jeunes sont sans doute plus visibles que mes fans âgés de 30 à 40 ans. Ce sont surtout les ados qui postent des commentaires sur ma page Facebook, par exemple.

Qu’est-ce que tu écoutes comme rap français ?

Quand j’écoute du rap français, je suis plutôt nostalgique. Le rap français pour moi c’est une entité, je dois me retrouver dans les textes. Le Rat Luciano c’est le parfait exemple. Quand je l’écoutais plus jeune, je me retrouvais totalement dans ses paroles. J’avais des frissons dans le dos. C’est pour ça que j’ai fait plusieurs feat avec lui dès que j’ai pu.

On sent qu’il y a beaucoup de références au cinéma de gangsters dans tes textes. C’est là que tu puises l’inspiration ?

Oui je m’inspire des classiques. Les films de Scorcese, de De Palma. Niveau séries, j’ai regardé Les Soprano mais je suis plutôt The Wire, Mafiosa et surtout Corleone qui reste ma série préférée.

Ce titre est plus émotionnel, moins noir que d’autres chansons de rap sur la prison. On pense notamment à “La lettre” de Lunatic

C’est un morceau que j’aime beaucoup. En 2000, lorsqu’il est sorti, j’étais en prison. Ce que Booba racontait rentrait directement en résonance avec ce que je pouvais vivre. C’est un très gros titre, c’est évident.

Pourquoi avoir intitulé une de tes chansons du nom de la série télévisée Oz ?

Cette chanson rend compte de l’univers carcéral. Je raconte ce que j’ai vu lors de ma dernière incarcération. Après je ne suis pas hyper fan de la série télévisée, j’ai vu que quelques épisodes. J’ai réemployé le nom de la série afin de faire comprendre que l’on parle de prison. Mais en fait quand tu écoutes, ce n’est pas ça du tout et tu te prends une tarte…

La violence décrite par la série Oz est-elle réaliste par rapport à ce que tu as connu ?

Dans la prison où j’étais nous étions plus de 1000 détenus. La prison était surchargée. Par cellule, nous étions 2 ou 3 parfois. Certains dormaient par terre. Faut savoir que quand tu as 1000 détenus, tu as toujours 200 brebis et 800 loups. Pour survivre, faut être un loup. Tout le monde marche avec un couteau pour se protéger. Il faut toujours être sur ses gardes. En prison, ton cœur, tu le laisses au greffe…

Propos recueillis par David Doucet
Vidéo Basile Lemaire

Le nouvel album de Lacrim "Corleone" est désormais disponible partout !

Version digitale:
- iTunes: http://po.st/CorleoneIT
- Amazon MP3: http://po.st/CorleoneAznMp3
- Google Play: http://po.st/CorleoneGP

Version physique:
- Coffret collector édition limitée Fnac (CD + Tee-shirt): http://po.st/CorleoneCoffretFnac
- CD simple (Fnac): http://po.st/CorleoneFc
- CD simple (Amazon): http://po.st/CorleoneAzn

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